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Contrat conclu intuitu personae et erreur sur la personne

Civil - Contrat
19/02/2020
Les conditions de l’exécution ultérieure d’un contrat conclu intuitu personae ne peuvent constituer un élément caractérisant l’erreur sur la personne au moment de sa conclusion.
La société S conclut avec la société E, ayant pour gérant M. G, des contrats de distribution de produits et services. Un arrêt devenu irrévocable reconnaît à M. G le statut de gérant de succursale. La société S assigne ce dernier ainsi que la société E en annulation des contrats de distribution pour erreur sur la personne. Elle soutient avoir eu l’intention de contracter avec la société E et non avec son gérant et qu’elle n’aurait pas conclu les contrats litigieux si elle avait été informée qu’ils seraient exécutés par celui-ci.

La cour d’appel rejette cette demande après avoir relevé qu’aux termes des contrats de distributions, ceux-ci ont été conclus « intuitu personae en considération de la personne morale de E ainsi qu’en considération de son dirigeant ; (ils) ne (peuvent) être cédé(s) en tout ou partie, sans l’accord préalable, exprès et écrit de S ». Selon les magistrats du second degré, il en ressort que la demanderesse a entendu souscrire ces contrats avec la société E représentée par M. G et les conditions de l’exécution ultérieure du contrat ne peuvent constituer un élément caractérisant l’erreur sur le consentement au moment de sa conclusion.

La Cour de cassation rejette le pourvoi de la société S sur ce moyen et valide le raisonnement de l’arrêt d’appel : « de (ses) énonciations, constations et appréciations, la cour d’appel a exactement déduit qu’aucune erreur n’avait été commise par la société S sur la personne de son cocontractant ».

La Haute juridiction casse et annule, en revanche, l’arrêt de la cour d’appel en ce qu’il condamne la société E à payer à la société S des dommages-intérêts correspondant aux rappels de salaires et congés payés qu’elle a versés à M. G après que le statut de gérant de succursale lui a été reconnu. Elle affirme que le fournisseur, condamné à payer au gérant de succursale les sommes qui lui étaient dues en application de ce statut d’ordre public, n’est pas admis à réclamer à la personne morale le reversement des sommes ayant rémunéré les prestations qu’elle a effectuées en exécution du contrat de distribution.
Source : Actualités du droit