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Évolution du droit familial : la parole de l’enfant prise en compte par le juge

Civil - Civil, Bien et patrimoine, Personnes et familles
20/10/2025

Le droit français accorde une place croissante à la parole de l’enfant dans les procédures familiales. Cette évolution s’inscrit dans un mouvement de reconnaissance de l’enfant comme sujet de droits. Aujourd’hui, l’audition du mineur devant le juge aux affaires familiales (JAF) est un élément déterminant dans les litiges relatifs à l’autorité parentale, à la résidence ou aux modalités de visite.

Fondement légal et portée

L’article 388-1 du Code civil consacre un principe essentiel : tout mineur capable de discernement et concerné par la procédure peut être entendu, à sa demande, à celle des parties ou d’office si le magistrat l’estime nécessaire. Cette audition s’insère dans le cadre de décisions qui touchent directement la vie de l’enfant : résidence habituelle, organisation du temps parental, choix d’établissement scolaire, etc.

Ce principe est en cohérence avec les engagements internationaux de la France, notamment l’article 12 de la Convention internationale des droits de l’enfant, qui reconnaît le droit de l’enfant à exprimer librement son opinion dans toute procédure le concernant.

Conditions et modalités de l’audition

Deux conditions principales guident la mise en œuvre de ce droit :

  • La capacité de discernement : aucun âge minimal n’est fixé par la loi. Le JAF apprécie la maturité de l’enfant et sa compréhension des enjeux. En pratique, l’audition peut être envisagée dès lors que l’enfant est en mesure d’exprimer un avis personnel éclairé.
  • Le lien avec la procédure : l’enfant doit être directement concerné par la décision à intervenir.

L’audition peut être sollicitée par le mineur (par courrier ou via son avocat), par ses parents, ou décidée d’office. Elle se déroule dans un cadre protecteur et confidentiel, souvent hors salle d’audience, afin de favoriser une expression libre et sereine. Elle peut être conduite par le juge ou une personne spécialement désignée.

Place de la parole de l’enfant dans la décision

Le mineur n’est pas partie à la procédure. Il ne tranche pas le litige et ne dispose d’aucun pouvoir juridictionnel. Son audition vise à recueillir ses sentiments, ses souhaits et, le cas échéant, ses craintes. Le juge demeure libre de son appréciation et peut ne pas suivre l’avis exprimé si l’intérêt supérieur de l’enfant commande une autre solution.

Cette audition n’a donc pas pour objet de « faire choisir » l’enfant entre ses parents. Elle éclaire la décision en offrant au magistrat une compréhension fine de la situation familiale, des besoins concrets du mineur et des effets pratiques des mesures envisagées.

En conclusion, l’audition de l’enfant devant le JAF illustre une transformation significative du droit de la famille : la parole du mineur, sans conférer un pouvoir décisionnel, devient un repère essentiel pour rendre des mesures adaptées. En recentrant l’analyse sur l’intérêt supérieur de l’enfant, cette pratique contribue à des décisions plus équilibrées, respectueuses de ses droits et de son bien-être au quotidien.